Un licenciement économique justifié par une dégradation de l’excédent brut d’exploitation ?

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Pour pouvoir procéder à un licenciement économique, votre société doit rencontrer des difficultés économiques, telles qu’une dégradation de l’excédent brut d’exploitation (EBE). Le juge a apporté des précisions concernant ce cas de figure.

L’excédent brut d’exploitation. L’EBE est le solde du compte d’exploitation. Il mesure ce qui reste de la valeur ajoutée de l’entreprise après rémunération des salariés et versement des cotisations sociales et des impôts sur la production.

Les faits

Une entreprise, confrontée à des difficultés économiques, supprime deux postes de travail en CDI, dont celui d’une directrice d’hébergement. Pour justifier ces licenciements économiques intervenus au début de l’année 2017, l’employeur explique que, depuis 2015, l’entreprise est confrontée à une dégradation de son EBE et risque de ne plus pouvoir faire face à ses échéances financières et de se retrouver en état de cessation des paiements si elle ne prend aucune mesure, notamment de réduction de la masse salariale.

Cependant, pour l’ex-directrice d’hébergement, l’employeur ne pouvait pas se fonder sur une évolution significative de l’EBE pour caractériser des difficultés économiques, dès lors que la situation de l’entreprise était sur le point de s’améliorer, son chiffre d’affaires ayant augmenté d’environ 25 % en 2016. La salariée conteste donc la légitimité de son licenciement devant la juridiction prud’homale.

La décision du juge

Les juges du fond donnent raison à l’employeur. La salariée est déboutée en première instance, puis en appel, les juges du fond estimant pour leur part que l’entreprise justifiait effectivement avoir été confrontée à des difficultés économiques caractérisées par une dégradation de son EBE depuis 2015, dégradation qui s’était bien poursuivie en 2017.

La Cour de cassation aussi. Le pourvoi de l’intéressée est également rejeté. Pour la Haute Juridiction, dès lors que la Cour d’appel avait bien constaté, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, une dégradation sérieuse et durable de l’EBE, elle avait pu en déduire que cet indicateur avait subi une évolution significative au sens de l’article L 1233-3 du Code du travail (Cass. soc. 1-2-2023 n° 20-19.661) .

EBE et licenciement économique

Une dégradation importante de l’EBE sur plusieurs années. Si les comptes de l’entreprise révèlent une dégradation importante de l’EBE sur plusieurs années, les juges du fond doivent retenir l’existence de difficultés économiques. À l’inverse, une dégradation simplement passagère et/ou de faible ampleur de l’EBE n’est pas révélatrice de difficultés économiques de nature à justifier un licenciement économique.

Une vérification effectuée par le juge du fond. Il appartient au juge prud’homal de contrôler le caractère réel et sérieux du motif économique du licenciement. Ce contrôle porte tant sur la réalité de la cause économique et des conséquences sur l’emploi que sur la relation de cause à effet entre ces deux éléments. Sur ce dernier point, il revient au juge de vérifier que la suppression ou transformation d’emploi ou la modification du contrat de travail est non pas strictement nécessaire ou indispensable, mais simplement justifiée par la cause économique alléguée, car il ne lui appartient pas de contrôler le choix effectué par l’employeur entre les différentes solutions possibles.